voyage vélo turquie akçakoca mer noire eregli

Voyage à vélo en turquie – Jour 9 : Eregli – Akçakoca

Nous prenons le temps dans l’hôtel standing pour sécher nos affaires qui avaient sérieusement besoin d’un coup de propre. En plus de tourner avec deux t-shirts et un seul cuissard depuis neuf jours déjà, l’étape d’hier nous a presque entièrement recouverts de boue. Notre salle de bain ressemble à un étendoir géant et vient dénoter avec la jolie moquette et les meubles cossus de la chambre. Nous descendons prendre le petit déjeuner. Il s’agit d’un grand buffet qui n’a aucun sens : viennoiseries, olives, pastèque, tourte à la viande, puis une sorte de ficello et même des frites.

Avant de reprendre l’itinéraire prévu, direction le Car Wash pour nettoyer les vélos. Malgré un passage dans la rivière hier, la boue s’est incrustée un peu partout dans les chaînes et les transmissions. L’étape du jour s’annonce facile avec peu de kilomètres et une longue route bétonnée le long de la côte jusqu’à Akçakoca. Si le cadre côtier est plutôt sympathique, il s’agit néanmoins d’une grosse route avec pas mal de trafic dont des poids lourds. On se met à la file indienne et on trace. La mer Noire semble peu accueillante sous le léger crachin qui nous accompagne depuis le départ. Son sable gris anthracite est jonché de détritus. Quelques paillotes vétustes ou autres centres balnéaires en friche jalonnent le parcours. Des caravanes sont parquées, coincées entre la deux fois deux voies et la mer, non loin d’une carcasse de vache en décomposition. On a connu mieux comme spot de camping.

Avant de faire une pause, on croise par hasard une statue de Nasreddin Hodja, philosophe fantasque et énigmatique du 13e siècle, bien connu dans la culture Turque. Il est représenté assis à l’envers sur un âne comme pour souligner sa façon de penser atypique. Je pense immédiatement à notre rencontre avec Adeline Baldacchino à Paris peu avant notre départ. C’est elle qui nous a fait découvrir ce personnage dont l’une des leçons diogéniques qu’elle a imaginée pourrait lui convenir parfaitement : “faire tout à l’envers, ne jamais concevoir une normalité de l’action, plutôt l’anticonformisme de principe que le suivisme de façade; et tant mieux si le rire affole un peu pour mieux sauver”. En témoigne cette petite histoire drôle, assez proche des anecdotes rapportées sur Diogène.

La lumière

Tard dans la nuit, Nasreddine Hodja était dans la rue à tourner en rond sous un lampa­daire. Son voisin, qui rentrait d’une longue soirée, passa prés de lui.

– Que fais-tu, Nasreddine, si tard ?
– J’ai perdu la clé de ma maison.
– Ne t’inquiète pas, je vais t’aider à la retrouver.

Le voisin se mit à chercher avec Nasreddine. Ils regardèrent partout, sous les pierres, sous les feuilles mortes, dans la poussière, mais en vain. Il n’y avait aucune trace de la clé.

– Dis-moi, Nasreddinne, es-tu sûr d’avoir perdu ta clé ici ?
– Non, je l’ai perdue dans l’autre rue, là-bas.
– Mais alors, pourquoi la cherches-tu ici ?
– Parce que là-bas, il fait sombre, alors qu’ici, il y a de la lumière.

cycliste et food truck en turquie

Quelques kilomètres plus loin, nous nous arrêtons sur un terre-plein accueillant un food-truck. Un vieil homme aux yeux rieurs nous prépare des kebabs dans son magnifique van vintage bleu électrique. La fumée émanant du toit du véhicule part se joindre au ciel chargé qui nous menace. Nous nous installons sur l’unique table en plastique, placée face à la mer en léger surplomb de la plage. Au loin, on observe une plateforme pétrolière. À l’horizon, c’est l’Ukraine et la guerre.

Peu avant d’atteindre notre destination, nous décidons d’emprunter un sentier qui longe la côte. Il semblerait que certains dans le groupe aient envie de rentabiliser l’achat de leur vélo Gravel. Nous trouvons encore le moyen de finir sur une piste pleine de boue. Baptiste, qui a hérité du vieux vélo de Yoann toujours blessé au genou, est vite contraint de continuer à pied. La terre ayant complètement bloqué sa roue avant. En passant un immeuble en construction, on se fait surprendre par un improbable troupeau d’oies qui se met à nous poursuivre.

Akçakoca se situe entre la ville balnéaire et le village de pêcheur, mignon et kitsch. Nous sommes reçus chez Hassan, un hippie turc, dans une jolie maison colorée avec jardin. On profite d’avoir du temps pour déguster notre première bière en terrasse. L’effet de l’alcool est immédiat sur nos corps usés. S’ensuit un restaurant entièrement vitré s’avançant sur la mer, a priori haut de gamme au vu du nombre de serveurs et de leur sens du service. On s’en sort finalement pour une bouchée de pain malgré de belles assiettes de poisson. On termine cette journée plus tranquille par une chicha au bord de l’eau.

cyclistes sur la côte de la mer noire en turquie

Laisser un commentaire